Des lectures en août

GHOST MONEY T1

La classe. Pas d’autre terme ne ressort de ce premier tome, inspiré de la lutte contre le terrorisme. En vrai récit d’anticipation, on découvre une Amérique des années 2020 à  bout de souffle, grossière et obsédée par l’argent amassé en bourse par les spéculateurs terroristes, lors du 11 septembre. Les services américains s’intéressent particulièrement à  Chamza, héroïne richissime, très liée à  l’émir des lumières, un poète à  la tête d’un mouvement démocratique qui ne fait pas les affaires d’une Amérique en mal d’ennemis. L’histoire, loin de la caricature, est sublimée par un Dominique Bertail en grande forme. Chaque planche où apparaît Chamza impressionne par ses lignes aériennes et sa luminosité. La dame de Dubaï ne pouvait pas être plus élégante.
En deux mots :
Terrorisme next gen.
De Bertail, & Smolderen aux éditions Dargaud, 60 pages – 13 €

LA MAIN DU SINGE T1

Culture tribale indienne, tatouages mystiques, casinos, greffes de peau : le premier tome de La Main du singe démarre avec un cocktail explosif. La recette n’en est que plus complexe. De nombreux flashbacks rendent la lecture exigeante, surtout que le récit s’articule autour de deux personnages mystérieux, situés sur une timeline différente. L’un est tatoué de partout, l’autre récupère une grande partie de ces dessins, suite à  la greffe de la mâchoire et d’un bras. Malgré les incessants changement de rythme, l’originalité de l’intrigue est captivante. L’occasion aussi de rappeler que Bamboo, au-delà  de ses séries humour, sait y faire en matière de bons thrillers et d’enquêtes policières.
En deux mots : tattoo tabou.
D’Alexis Laumaillé, aux éditions Bamboo – 48 pages – 12,90 €

ME AND THE DEVIL BLUES T1

Légende du blues, Robert Johnson voit son histoire librement adaptée en manga par Akira Hiramoto. Sur un rythme lent, les 250 pages de ce premier volume sont quasi entièrement consacrées au fameux pacte passé entre RJ et le diable. Quelques notes dans un cimetière, et le voilà  prodige du blues, dépassant Son House à  la guitare. Relativement proche de la véritable histoire de Johnson, le manga s’en éloigne à  la fin du volume, imaginant une rencontre entre le bluesman et le grand bandit Clyde Barrow. Très détaillé, presque torturé, le graphisme du mangaka est réaliste et expressif. Des atouts indispensables pour évoquer l’émotion d’un blues de papier.
En deux mots : Le diable a le blues.
De Akira Hiramoto, aux éditions Kana – 250 pages – 7,35 €

COMMANDO COLONIAL T1

Quittant une île – La Réunion, avec Lewis Trondheim – pour une autre, Appollo concocte une histoire de guerre authentique, dans le décor exotique de Madagascar. De l’autre côté de l’océan, la Seconde Guerre mondiale ensanglante l’Europe et Churchill mijote l’opération Ironclad, pour conquérir Madagascar. Calme en apparence, le pays est un vrai carrefour stratégique, où se mêlent colonialistes, nationalistes, britanniques, pétainistes ou encore gaullistes ! Un melting pot politique traduit par une incroyable galerie de personnages. Un des bijoux de la rentrée.
En deux mots : Un commando, deux comme vandales.
De Brüno & Appollo, aux éditions Dargaud, 48 pages – 10,40 €

LUCHA LIBRE T8

Si ce numéro de Lucha Libre était un plat, ce serait l’assiette dégustation, incontestablement. Toutes les séries sont présentes, avec des personnages inédits d’anthologie, de Salomon, sorte de boucher redneck fou à  Zeus et ses apollons poilus, sans compter Morue, une sirène moche et dégueulasse, ancienne pute sur le bateau du commandant Cousteau… En marge des séries phares, un récit court signé Romuald Reutimann s’apprécie en dessert. On y découvre la passion culinaire d’El Gastronomo, plus gastro que nomo, d’ailleurs. Seul bémol, le prix. Il passe de 7,90 à  9,90 euros. Même le melon n’augmente pas tant. Sans doute à  cause des 3 posters géants livrés avec le numéro. Mais depuis quand fait-on payer l’apéro ?
En deux mots : Farandole de pains dans la gueule
De Frissen & Collectif, aux Humanoïdes Associés, 54 pages – 9,90 €

LADY SNOWBLOOD T3

Présenté comme un épilogue, ce troisième volume est une véritable suite aux deux premiers tomes. Après un suicide raté, l’héroïne refait sa vie en professeur de gym suédoise. Une discipline conspuée par le ministère des armées, nostalgique des traditions et d’un Japon conquérant. Au point que ces conservateurs n’hésitent pas à  liquider d’éminentes personnalités du ministère de l’Éducation, réputé pour ses idées progressistes. S’en suit une nouvelle vengeance pour la femme à  l’ombrelle. Le récit est toujours aussi glamour, les dessins encore plus gracieux, bref, un manga superbe et autant instructif sur le plan historique que les premiers volumes.
En deux mots : Gym (très) tonique.
De Koike & Kamimura, aux éditions Kana – 380 pages – 12,50 €

LA FIN DU MONDE

À l’image de ce mois d’août, l’essentiel de La Fin du monde se passe sous une pluie diluvienne. Une jeune femme s’abrite dans la maison de son enfance, squattée par un chat et une vieille dame inquiétante, quasi morbide. La maison n’est pas nette non plus. À l’étage, une pièce mystérieuse est l’objet de toutes les attentions… Parsemé d’éléments fantastiques, ce récit de Wazem et Tirabosco est un one shot mélancolique. Les dessins charbonneux et sombres illustrent des thèmes pas franchement drôles, de la pluie à  la mort, du souvenir au passé douloureux. Une lecture (trop) pleine d’émotions.
En deux mots : Tsunami de mélancolie
De Wazem & Tirabosco, aux éditions Futuropolis, 116 pages – 19 €

HORLEMONDE T1

Adapter des romans SF en BD ? Un défi délicat que ne parvient pas à  relever Horlemonde. Malgré une intéressante histoire de science-fiction mâtinée de fantasy et une ambiance climatique parfaitement restituée graphiquement, les enchaînements scénaristiques et les dialogues peinent à  convaincre. Idem pour nombre de situations improbables, comme celle où un des héros, sur le point d’être pendu, est détaché pour prêter main forte, puis pardonné pour service rendu, en moins de trois planches. Un ficelage sans doute trop dense qui, à  force de maladresses, laisse perplexe.
En deux mots : 48 pages chrono
De Galliano & Peyravernay, d’après Verlanger aux Humanoïdes Associés – 56 pages – 12,90 €

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