Référence parmi les références en matière d’heroïc fantasy, La Quête de l’Oiseau du Temps est un chef d’œuvre dû à la plume experte de Serge Le Tendre. En son temps, l’oeuvre consacra le talent d’un des plus grands dessinateurs actuels, Régis Loisel.
En des temps immémoriaux, le dieu maudit Ramor s’était opposé aux autres divinités pour posséder à lui seul le pouvoir-force et régner sur Akbar. Défait, il avait été enfermé dans une conque et privé de sa puissance. Mais les dieux avaient fini par s’en aller, laissant Ramor seul, avide de vengeance : il attendait l’heure de sa libération, l’heure où le sortilège le liant à sa conque se briserait enfin, l’heure où il pourrait déchaîner sur le monde sa colère. Et cette heure est proche. Très proche, même… La princesse-sorcière Mara est la seule à pouvoir sauver Akbar, elle qui a pu déchiffrer le grimoire des dieux anciens ; mais elle manque de temps pour achever l’incantation qui permettrait de renouveler le sortilège liant Ramor à sa conque. Elle enverra donc le légendaire chevalier Bragon et sa fille Pélisse en quête de l’oiseau du temps, un être magique grâce auquel Mara pourra arrêter le temps et parvenir à ses fins.
L’histoire, si riche qu’il est inconcevable de la résumer en si peu de mots, s’articule en quatre tomes et ce découpage n’est pas le fruit du hasard. Il est en effet rare de voir l’ambiance d’un récit changer à ce point d’un album à l’autre, si bien que chacun possède ses spécificités : une vieille cité de pierre dans des montagnes inaccessibles, un temple perdu au milieu d’un désert impitoyable, la forêt impénétrable du Rige où seule la chasse fait loi, les vastes étendues neigeuses de la Marche blanche… Tels sont les décors des quatre épreuves de la Quête de l’Oiseau du Temps. Des décors dans lesquels les personnages devront faire face à des adversaires terrifiants, mais qui devront surtout apprendre à se connaître eux-mêmes, à regarder au plus profond de leur âme pour s’apercevoir que leur quête n’a pas pour unique but de sauver le monde, mais de donner un sens à leur vie : c’est leur propre destinée qui est en train de se jouer.
Les relations qu’ils entretiennent ne sont pas non plus figées, loin s’en faut, et tous, à la lumière des épreuves qu’ils auront à subir, finiront par se voir sous un autre jour. En dehors des héros lancés dans la Quête de l’Oiseau du Temps, les personnages secondaires sont nombreux et ont tous leur personnalité propre, même s’ils n’apparaissent souvent que dans un seul tome. Tous exerceront également une influence sur l’issue de la Quête.Tout est donc parfait ? Aurions-nous déniché la perle rare ? La série qui échappe à toute critique ? Hélas non ! Le premier tome est largement en dessous des trois autres, que ce soit au niveau du dessin pas encore totalement abouti que du scénario qui prend un départ plutôt lent. Cette série a été pensée comme un tout, et il faut la considérer comme telle. Cette petite réserve mise à part, rien ne saurait dissuader l’amateur de destins grandioses et d’aventures palpitantes de découvrir La Quête de l’Oiseau du Temps…
Avant la Quête
Le monde d’Akbar est si vaste et la vie de ses héros si riche en rebondissements qu’un cycle n’aura pas suffit à tout nous faire découvrir. Le Tendre et Loisel ont donc entrepris de nous conter la rencontre de Bragon et Mara, à une époque où ils n’étaient encore respectivement qu’un jeune homme en quête d’aventures et la fille du prince-sorcier de la Marche des voiles d’écume. Aborder un nouveau cycle est toujours chose délicate, mais le doute n’est pas permis, c’est bien l’envie de nous faire pénétrer plus avant dans le pays des sept marches qui a présidé à la création de cette suite : l’histoire reste passionnante, les références au premier cycle sont nombreuses, les personnages continuent de se développer et la trame, relevée de nouvelles intrigues et de nouveaux héros, se tient magnifiquement.
Restait le problème du dessin, et c’était certainement là le défi le plus difficile à relever : comment trouver un dessinateur qui saura succéder à Loisel (qui assure lui-même la mise en couleurs et la mise en scène pour garantir une certaine continuité) ? Ils avaient trouvé le remplaçant idéal en la personne de Lidwine : un trait peut-être plus anguleux que celui, tout en rondeurs, de Loisel, mais une beauté indéniable, et une reprise des personnages impeccable. Las ! L’auteur du Dernier loup d’Oz, pour des raisons que nous ne connaîtrons sans doute jamais, n’est pas parvenu à assurer un rythme de parution pouvant convenir à une telle série populaire. Le voilà donc remplacé par Mohamed Aouamri, dessinateur du premier cycle de Mortepierre. Est-ce le bon choix ? Saura-t-il succéder à deux auteurs de la classe de Loisel et Lidwine ? Telle est la question, et lui seul en détenait la réponse jusqu’à ce que ce nouvel album, tant attendu par d’innombrables fans, ne paraisse enfin. Il va sans dire que le résultat est à la hauteur de l’attente… Qu’ajouter sans trop en dévoiler ? Rien sinon que les auteurs continuent de se poser en référence dans l’univers trop peu créatif de l’heroïc fantasy en bande dessinée. Sans vouloir passer de la disette à l’opulence, ils devront simplement songer à des délais de parution plus raisonnables pour alimenter le mythe que constitue plus que jamais La Quête de l’Oiseau du Temps. Le rendez-vous est déjà pris pour les deux prochains albums avec aux pinceaux le talentueux Vincent Mallié, dessinateur de la série Le Grand Mort. C’est vers lui que tous les regards sont désormais tournés… et vers le Rige qui devrait (bientôt ?) faire son grand retour…
Vacom
La Quête de l’Oiseau du Temps (4 tomes parus)
La Quête de l’Oiseau du Temps – Avant la Quête (2 tomes parus)
Une série de Le Tendre, Loisel, Lidwine et Aouamri, disponible aux éditions Dargaud.
Les images sont é Dargaud et les auteurs.