Pride of Baghdad : une version française saccagée

Pride of Baghdad est un très bon album de BD qui nous conduit aux cotés de 4 lions échappés du zoo de Bagdad. Alors que l’adaptation française vient de sortir chez Panini, nous constatons avec tristesse le gâchis éditorial mené par l’éditeur. Format plus grand, lettrage différent, coupes sauvages de planches… la preuve en images.

Malgré un thème casse-gueule, celui de la récente guerre en Irak, Brian K. Vaughan et Niko Henrichon étaient attendus au tournant avec Pride of Baghdad, un roman graphique paru aux USA chez DC Vertigo. Si, sur le fond, l’album est une réussite avec un récit emprunt de sensibilité et de poésie (lire notre chronique dans le numéro 12 de Wart), nous n’avions pas pu prendre connaissance de l’adaptation française au moment du bouclage de notre interview du dessinateur, parue dans le Wart 11.

Un livre travesti sur la forme

Une fois le livre en main, la VF semble avoir fière allure. Mais elle ne correspond plus à  l’oeuvre originale sur plusieurs points. Le format d’abord a été considérablement agrandi pour la version française. Proposé par l’éditeur en grand format, le livre est paru aux USA en petit format cartonné sous jaquette. Plus jolie en tant qu’objet, la VO rend naturellement justice aux planches du dessinateur.
Dans la VF, le trait souffre parfois de l’agrandissement, mais pire, les planches ont dû être redimensionnées et coupées en haut et en bas, afin de rentrer dans le nouvel habillage prévu par Panini. Concrètement, le dessin est rogné de façon importante, ce qui a aussi pour effet de ne plus proposer les blancs qui cernent la plupart des pages de Pride of Baghdad.

Des détails qui font aussi la différence

Dans une moindre mesure et sans même vous parler du 4ème plat de couverture complètement pixellisé sur la VF, le lettrage pourtant numérique de la version d’origine n’a pas été conservé par l’éditeur européen pour une raison que l’on ignore. Le nouveau lettrage, plus froid, est notamment moins expressif lors d’un passage très « secouant » dans le palais du dictateur (je ne vous en dis pas plus pour ne pas vous gâcher la surprise si vous n’avez pas lu le livre).
L’immersion, mine de rien, en prend un coup.

Et le positif dans tout cela ?

Au milieu de ces choix douteux, le seul vrai point positif de cette adaptation est sa qualité d’impression nettement supérieure à  l’originale. Ici, les trames ne se voient quasiment pas, même sur les planches sombres, un handicap dont souffre particulièrement la version d’origine. Selon nous, la restitution des couleurs est donc meilleure sur la version française mais ne rattrape clairement pas les dégâts décrits plus haut. Que vous conseiller alors ? Pour les anglophones, il n’y a pas à  hésiter, la VO s’impose. Pour les personnes qui ne lisent pas l’anglais ou qui ne se sentent pas de partir à  l’aventure en VO, le livre en français se lit bien quand même, mais on garde en travers de la gorge le fait que Panini privilégie un grand format pour ses arguments marketing, plutôt que l’oeuvre originale et son intégrité…

JK