Après le Troisième Testament, réalisé en compagnie de Xavier Dorison chez Glénat, Alex Alice remet le couvert avec une adaptation du mythe nordique de Nibelungen. Attendu courant octobre chez Dargaud, Siegfried est le premier tome d’une trilogie.
Comparée au Troisième Testament, l’histoire du Da Vinci Code passerait presque pour de la gnognotte. L’aventure ésotérico historique mijotée par Alice et Dorison s’étalait sur quatre volumes où chaque épisode donnait son lot d’informations et de révélations au beau milieu d’inoubliables plans épiques. Attendu au tournant, Alex Alice se lance seul dans une adaptation du mythe de Nibelungen, dont la plus fameuse vision est incarnée par l’opéra tétralogique de Richard Wagner.
Le Seigneur de l’anneau
Au premier coup d’œil, rien n’indique que la « série événement » est une adaptation plutôt qu’un scénario inédit. Force est de constater que le mythe de Nibelungen n’est pas le plus connu dans l’Hexagone. Il y est question du pouvoir absolu de l’Or du Rhin, protégé par les Walkyries, filles du Dieu Odin. L’une d’entre elles va pécher en copulant comme une petite coquine avec un mortel et les ennuis vont arriver, à commencer par la fabrication d’un anneau aux pouvoirs exceptionnels. Vous l’avez deviné, Nibelungen a servi de terreau fertile à bon nombre de grands auteurs de fantasy parmi lesquels Tolkien…
L’auteur du Seigneur des anneaux s’est en effet copieusement inspiré du mythe et c’est en toute logique que les plus jeunes qualifieront Siegfried de repompe grossière. À l’image de l’épée brisée qui attend d’être reforgée, certains thèmes forts sont passablement émoussés, et perdent toute originalité. Nombreux sont les films, jeux ou de bandes dessinées comme L’anneau des Nibelungen de Sébastien Ferran aux éditions Emmanuel Proust ou Le Crépuscule des Dieux de Jarry et Djief chez Soleil, à s’y être cassé les dents, peinant à affirmer leur différence sur les étals des marchands de culture.
L’essence du mythe
De son côté, Alex Alice réalise un gros travail d’adaptation et, à force de rechercher les archétypes des différents protagonistes, parvient à capter l’essence de chacun d’entre eux, posant en quelques attitudes leur caractère et leurs sentiments. Autre choix de l’auteur, à l’inverse d’une série comme Arthur de Chauvel et Lereculey, les noms propres difficilement prononçables passent à l’as, tout comme les dialogues sibyllins qui bien souvent minent un récit, aussi bien mis en image soit-il.
De ce point de vue, Siegfried est tout simplement exceptionnel. Le découpage inspiré du cinéma hollywoodien laisse une large place aux plans gigantesques. Ceux qui étaient impressionnés par le souffle épique de nombreuses compositions du Troisième Testament vont être, ici, largement servis. Les 8 pages d’ouverture laissent ainsi un souvenir mémorable, tout autant que la scène finale de l’épée où la composition de la planche épouse l’action du personnage.
Au bout du compte, la qualité graphique ne suffit pas à étancher la soif de nouveauté. Siegfried n’aura pas le même poids que Le Troisième Testament. Parfait, grâce au travail d’orfèvre et à l’efficacité du récit de l’auteur, ce tome de 70 planches souffre de l’absence de surprise qui fait cruellement défaut à toutes adaptations d’œuvres et de mythes éculés. À l’image d’une Barbie, malgré sa plastique superbe, on semble déjà tout savoir d’elle.
Découvrez le pilote du long métrage d’animation Siegfried.
JK
Les images sont é 2007 Dargaud/Alice.