Tel Aviv, dans l’Ipod Store :
– Des deux côtés, on prend des photos de gens qui font le même métier.
– à‡a ne marchera jamais.
– Pourquoi ?
– Parce qu’il n’y a pas d’Ipod Store en Palestine !
Après l’artiste anglais Bansky, c’est au tour du photographe JR de poser son style sur le mur de séparation israélo-palestinien.
Suite à sa rencontre avec Marco, un entrepreneur en technologie, JR a pris en photo les grimaces de Palestiniens et Israéliens exerçant le même métier. Le duo a ensuite collé ces 1 500 m² d’images en très grand format sur le mur et dans les villes. Bien accueillies ou parfois dégradées, les photographies n’ont en tout cas pas laissé indifférents les premiers spectateurs sur place. Wart a profité de la sortie du livre, en librairie depuis le 14 juin, pour en toucher un mot.
Comment êtes-vous parvenus à financer un tel projet ?
Marco : Cela n’a pas été un problème, car nous avons été aidés par une bande de copains qui sont venus avec nous à leurs frais sur leur temps de vacances en considérant qu’ils n’en passeraient pas de meilleures ailleurs. Le reste des frais a été réduit pas les prestataires (fournisseurs d’affiches, hôteliers…) car ils aimaient le projet. Nous sortons un livre et faisons des expos dont les recettes permettront de boucler le budget.
Avez-vous rencontré des personnes refusant d’être photographiées ?
M : Nous avons rencontré très peu de gens qui ont refusé d’être photographiés. En fait, uniquement des chefs d’entreprises palestiniens qui étaient par ailleurs très sympathiques et qui nous ont bien reçu. Je ne sais pas pourquoi ils ont refusé, mais ce n’était pas par haine de qui que ce soit.
Nous avons remarqué qu’au bout d’un mois, les affiches étaient dégradées, quel a été l’accueil des gens au moment du collage ?
M : Pendant le collage, seule une affiche a été dégradée, sinon les gens étaient curieux, posaient des questions et proposaient de nous aider. Après notre départ, certaines affiches ont été arrachées, mais la plupart sont restées. De toute façon, la pluie finit par les décoller. Cela fait partie du projet. Nous faisons de l’éphémère.
A-t-il été facile de procéder au collage de part et d’autre du mur ?
M : Nous n’avons eu aucun problème à rentrer en Israël avec les affiches. Cela nous a beaucoup surpris. Pendant les collages, nous avons été arrêtés à quatre reprises. Rien de très méchant. Dans notre groupe, il y avait de tout. On trouvait toujours un moyen de dialoguer. Cela faisait aussi partie du projet. On le leur disait : « Maintenant, vous faites partie du projet. »
Quelles retombées attendez-vous du projet ?
M : J’espère que nous avons ouvert une brèche et que des Palestiniens et des Israéliens vont mener ensemble, sans nous, ce type d’initiatives.
Face2Face aux éditions Alternatives
Les portraits sont regroupés sur plus de 140 pages, toutes présentées de la même manière : double page pour les deux portraits et double page pour les lieux de collage dans chaque pays. Chacun des protagonistes a aussi eu l’occasion de s’exprimer en une phrase par rapport au conflit. On notera tout particulièrement les témoignages porteurs d’espoir de Cheikh Aziz, Brother Jack et Reb Eliyahu, trois représentants des trois principales religions, réunis pour grimacer.
La partie « carnet de voyage » permet aussi de connaître le cheminement du projet, comment celui-ci est parti d’un coup de tête pour mûrir ensuite vers une action qui a été taxée d’utopie par certains. Le livre se conclut parfaitement par des anecdotes et citations imposant la réflexion. Parfois interpelée, parfois encouragée, la fine équipe de collage traverse le pays en gardant humour et finesse d’esprit.
A voir
– Le site de JR
– Le site du projet Face2Face
– Le site des éditions Alternatives
– Toutes les vidéos du projet sur Dailymotion
– Le reportage d’Arte
– Notre article Des graphs, au plus près du mur
Les photos sont é Wart.