Après une première fournée d’albums particulièrement réussis, le label KSTR lance deux nouveaux titres en librairies. Attendus de pied ferme, Sheytan et Vilebrequin permettent de faire le point sur les soucis d’impression entrevus. Le constat est sans appel, si la bande dessinée Sheytan de Viravong est épargnée, Vilebrequin se retrouve complètement tronqué tant au niveau de l’impression que de la mise en page.
Dans Vilebrequin, Arnaud le Gouëfflec et Obion racontent la petite vie d’un roi de la cambriole. Du choix de la tenue à son faux métier de jazzman, le livre est construit sur un système de double pages, qui mettent en image divers thèmes bien précis. De ce postulat de base, le livre promet une partition jouissive et rythmée, soutenue par des compositions graphiques cohérentes et des cadrages symétriques. Mais de manière difficilement explicable, l’éditeur a commis une erreur en s’égarant dans la mise en page du livre. La bévue se traduit par un décalage des planches, qui casse en deux toutes les doubles pages de ce one-shot.
Malgré cette énorme faute, le lyrisme reste présent grâce à la narration savoureuse mais perd énormément en fluidité… Si un œil distrait ne remarquera pas forcément la cohérence des cadrages ou des compositions, le lecteur se heurte très vite à l’évidence des thèmes traités, qui se bouclent laborieusement d’une page à l’autre. Le plaisir de lecture en est considérablement miné, un constat d’autant plus rageant au vu du travail minutieux des auteurs sur cette partie.
ci-dessus, en haut une double page du livre. En bas, la double page telle que nous aurions dû la trouver.
Une impression complètement ratée
Las, par-dessus les soucis de narration, l’impression est elle aussi catastrophique. Si les petits défauts relevés lors du premier office étaient pardonnables, ceux de Vilebrequin le sont difficilement. Immédiatement une sensation de flou submerge le feuilletage. Aussi stupéfiant que cela puisse l’être, le livre n’a pas été imprimé en noir et blanc comme le laissaient croire les visuels du site officiel, mais en niveaux de gris ! Concrètement, les coups de pinceau d’Obion sont largement visibles là où un noir profond devait l’être (cf. nos visuels avec en haut et à gauche la version attendue, en bas et à droite le résultat imprimé), entrainant une densité inutile et un effet artistique franchement disgracieux. Contacté par nos soins, Obion confirme l’erreur d’impression.
Quant au papier ivoire, alors qu’il péchait déjà sur Elle(s) de Bastien Vivès en absorbant une partie de la luminosité des couleurs, il semble ici inapproprié au noir et blanc, surtout face à une couverture qui, elle, l’est totalement ! Cela, sans compter les effets de trames sur le dessin, qui procurent une perte de netteté particulièrement regrettable sur les détails.
Un incroyable gâchis
Si Vilebrequin est un album réjouissant, bénéficiant d’un dessin fluide, de cadrages et découpages recherchés servis par un scénario et une narration au poil mijotés par Arnaud le Gouëfflec, la fabrication du livre est quant à elle un pur désastre. Une succession d’aberrations qui en plus de trahir l’esthétisme, gênent considérablement la lecture de l’album.
Face à cette erreur, l’éditeur s’est engagé par voie de communiqué à procéder à une réimpression des ouvrages, afin de corriger la mise en page. Selon nos informations, le label KSTR n’a pas pu confirmer, à l’heure où nous publions ces lignes, si le passage en noir et blanc de l’ensemble serait effectif. Les lecteurs ayant acheté le livre pourront en tout cas l’échanger gratuitement auprès de leur libraire courant août, lors du nouvel office. De leur côté, les auteurs jugent ces développements inacceptables, soulignant l’absence de retrait des exemplaires déjà disponibles en librairie.
D’ici là , une solution existe toujours pour lire Vilebrequin dans sa forme originelle. Munissez-vous de deux exemplaires du livre et dépouillez-les consciencieusement pour reformer à la main les doubles pages conçues par les auteurs. Avec un bon cutter, un tube de colle et les Puppetmaztaz en fond sonore, tout devient possible et laisse enfin apparaître dans le label le coté rock tant attendu !
Les images sont é Casterman – Obion – Le Gouëfflec.
La position des auteurs sur le blog d’Obion.
La position de l’éditeur sur le blog Kstr.
Le communiqué du Syndicat des auteurs de bande dessinée.
Notre article sur le lancement de Kstr.
Publié le 14.06.2007Â